POLÉMIQUE/COVID-19 : LE DOSSIER MÉDICAL D’UN MALADE EST SECRET

Depuis le développement de la maladie à coronavirus en RDC, plusieurs personnes se plaignent de ce que le Gouvernement et les autres structures impliquées dans la lutte gardent secrète l’identité des personnes atteintes ou décédées, particulièrement lorsqu’il s’agit des hommes ou femmes publics, dont des membres du Gouvernement. Des réclamations se font pressantes sur les médias et leurs programmes alternatifs, tandis que le ministre de la santé, qui s’est récemment refusé de faire droit à cette demande, fait l’objet d’invectives de tous genres dans les réseaux sociaux.

Après enquête et interrogation de la législation, il s’avère, d’une part et selon la loi, que le dossier médical d’un malade est confidentiel et que, d’autre part et selon les règles de déontologie, le médecin ou tout autre agent médical sont tenus au secret professionnel sur ce dossier. En effet, l’Ordonnance n° 70-158 du 30 avril 1970 déterminant les règles de la déontologie médicale en RDc stipule ce qui suit :

« Art. 40 : Le secret professionnel implique une absolue discrétion au sujet de ce que le médecin a vu ou entendu dans l’exercice de sa profession.

Art. 41 : Le médecin doit veiller à ne pas dévoiler le secret médical, soit par ses paroles, par ses écrits professionnels ou administratifs, soit par ses publications ou communications scientifiques.

Art. 42 : Le certificat qui, par son texte, dévoile un secret médical, sera remis directement au malade qui peut en disposer à son gré.

Art. 43 : La communication d’un diagnostic ou de renseignements d’ordre médical peut se faire moyennant les précautions nécessaires:

1° à une autorité médicale supérieure, reconnue par le malade du fait de son appartenance à un organisme employeur vis-à-vis duquel il est lié par contrat et qui l’a affilié d’office à un régime de sécurité sociale. Les renseignements d’ordre administratif que les nécessités imposées par le travail, ou la poursuite d’une carrière, obligent le médecin à fournir à un organisme employeur par toute autre voie que celle de l’autorité médicale supérieure précitée doivent faire l’objet de certificats administratifs qui ne peuvent mentionner le diagnostic ni aucune précision susceptible d’en révéler la nature;

2° à leur représentant légal, quand il s’agit de malades incapables ou inconscients;

3° en cas de nécessité à toute personne qualifiée, moyennant le consentement du patient ».

Les médecins sont particulièrement astreints au respect de ces dispositions légales, d’autant plus que leur code d’éthique et de déontologie est annexé à l’ordonnance sus-évoquée. De la sorte, toute infraction à ce code est passible de sanctions pénales et civiles en plus des sanctions professionnelles.

Par ailleurs, Edmond Mbokolo Elima, avocat et professeur, stipule, dans son cours sur « la responsabilité » médicale en droit congolais » qu‘ «une personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. Ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, de tout membre du personnel de ces établissements ou organismes et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s’impose à tout professionnel de santé, ainsi qu’à tous les professionnels intervenant dans le système de santé.

Toutefois, poursuit Mbokolo, « deux ou plusieurs professionnels de santé peuvent, sauf opposition de la personne dûment avertie, échanger des informations relatives à une même personne prise en charge, afin d’assurer la continuité des soins ou de déterminer la meilleure prise en charge sanitaire possible. Lorsque la personne est prise en charge par une équipe de soins dans un établissement de santé, les informations la concernant sont réputées confiées par le malade à l’ensemble de l’équipe ».

Dans tous les cas, ajoute Me Edmond Mbokolo, « les informations concernant une personne prise en charge par un professionnel de santé au sein d’une maison ou d’un centre de santé sont réputées confiées par la personne aux autres professionnels de santé de la structure qui la prennent en charge. La personne, dûment informée, peut refuser à tout moment que soient communiquées des informations la concernant à un ou plusieurs professionnels de santé ».

Enfin, conclue-t-il, « il faut noter qu’en cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s’oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire délivrer sous sa responsabilité, ces informations ».

Il faut souligner que le secret professionnel et la confidentialité du dossier médical d’un patient demeure de mise même après son décès, conformément à la loi et au code d’éthique et de déontologie du médecin et du personnel médical.

L’on reconnaît que le débat sur le secret médical ne date pas d’aujourd’hui et n’est pas l’apanage de la RDC. La pandémie du coronavirus l’a relancée de plus belle comme ce fut le cas, par exemple, dans les années 80 avec le Président français François Mitterrand lorsqu’il fut brièvement rendu indisponible suite à des ennuis de santé. Aujourd’hui, plusieurs personnalités publiques, dont des membres de gouvernements, dévoilent leurs dossiers de santé dans le but purement de la sensibilisation.

Jonas E Kota

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