100 JOURS D’URGENCE : QUI FINANCE LES SAUTS-DE-MOUTON ?

Dès sa prise de fonctions comme Président de la République, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo s’était dit ouvert aux critiques de son action, certainement dans le cadre de la participation des citoyens (en tant que souverain primaire) au fonctionnement de l’Etat. Depuis lors, les congolais s’y adonnent à cœur joie, au point d’en abuser à certains moments.

Le débat sur les dépassements budgétaires au premier trimestre de l’ère Tshisekedi s’inscrit certainement dans ce cadre, avec son prolongement sur le financement du programme des 100 jours d’urgence du Chef de l’Etat. Un prolongement qui débouche, spécifiquement cette fois-ci, sur le financement des sauts-de-mouton à travers la ville de Kinshasa.

Le débat est parti d’un panneau de chantier dont la photo est devenue virale dans les réseaux sociaux. Ce panneau renseigne, entre autres, que ces travaux, du moins pour le cas du saut-de-mouton au carrefour du Boulevard du 30 juin avec l’avenue de la Libération, sont financés par la présidence de la République.

Les commentaires vont ainsi bon train pour savoir si la présidence de la République – qui n’a aucune personnalité juridique et, moins encore, de compétence en la matière – peut financer ce genre de travaux. Ceci d’autant plus que le même panneau renseigne que le patron de ce projet de saut-de-mouton est la « République démocratique du Congo » représenté par le « Ministère des infrastructures, travaux publics et reconstruction ». Et l’Office des voiries et drainage est identifié comme « maître d’ouvrage délégué ». Même s’il restera de savoir quand et comment l’exécutant de ces travaux, la société chinoise CGCD a obtenu ce marché, personne n’ayant eu vent d’un appel d’offre y relatif – transparence (lisez bonne gouvernance) oblige.

 

D’où provient le financement des sauts-de-mouton ?

A quel titre donc la « Présidence de la République » apparait-elle dans le financement de ce projet (du moins sur le panneau du chantier) et sur quel compte puiserait-elle les fonds pour ce faire ? En se reportant sur le document du programme des 100 jours d’urgence du Chef de l’Etat publié en son temps par la direction de la communication du Président de la République, l’on dénombre un total de 13 sauts-de-mouton à aménager dans la ville de Kinshasa à raison de 4 à réaliser par l’Office des routes et 9 autres par l’Office des voiries et drainage (Cfr Pp. 10 et 52).

Pour le financement de ces travaux et sa source, il faut se reporter à la page 2 du même document. Le tableau synthèse y repris indique que le volet « routes » (routes, voirie, ponts, bacs et entretien de matériels) a un coût global de Usd 240.438.329 à raison de Usd 183.183.796 pour l’Office des routes et Usd 57.254.533 pour l’OVD. Le montant total pour les 100 jours d’urgence s’élève à Usd 79.563.753.

Quant à la source de financement des sauts-de-mouton figurant dans le programme des 100 jours d’urgence, le même tableau synthèse indique « Le Trésor public » pour un montant de Usd 109.454.629 et le « Foner » (Fonds national d’entretien routier) pour Usd 27.363.657,2.

De tous ces éclairages, la question qu’il conviendrait de poser serait de savoir si la « présidence de la République » financerait des travaux dans le cadre du programme des 100 jours d’urgence du chef de l’Etat. Les spécialistes sont mieux placés pour y répondre avec les compétences requises. Mais en attendant et pour écarter toute confusion, l’on peut retenir que le « trésor public » indiqué dans le tableau synthèse se définit techniquement et juridiquement comme « un organisme public chargé de collecter au nom de l’Etat l’impôt sur le revenu et les contraventions des contribuables et contrevenants ». L’on retient aussi que « le Trésor public ne dispose pas de sa propre personnalité juridique. Il se confond juridiquement avec l’Etat ».

Ceci devrait avoir le mérite de nous épargner des « saute-moutons » lorsque nous parlons de ces « sauts-de-mouton »…

Jonas Eugène Kota

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