CRISE AU SANKURU : POUR UNE SOLUTION A L’ITURIENNE

Face à l’ambiance de haine et d’intolérance inter-communautaire qui règne au Sankuru autour du contrôle du pouvoir et donc de la province, les observateurs préconisent la neutralisation politique des leaders de trois des cinq territoires de cette province en attendant de régler les problèmes de fond. Une idée inspirée par la situation de l’Ituri où un deal avait été passé avec les communautés hema et lendu dont les acteurs politiques s’étaient interdits de présenter des candidats pour le gouvernorat de la province.

Près d’un mois vient de s’écouler depuis la suspension de l’élection du Gouverneur de la province du Sankuru. Une suspension obtenue par le Président de la République, Félix Tshisekedi, pour essayer de faire un arbitrage sur la double crise politique et institutionnelle qui bloque cette élection. Cette crise est partie du rejet de la candidature de l’indépendant Stéphane Mukumadi par la Cour d’appel qui lui avait trouvé un défaut de nationalité congolaise. Il serait, en effet, détenteur d’un passeport français et aurait obtenu un visa d’établissement en RDC une année plus tôt.

La décision de la Cour d’appel de Lusambo a ensuite été cassée par la Cour de cassation avant que cette dernière ne se voie condamnée par le Conseil d’Etat qui, à son tour, sera tancée par le Conseil supérieur de la magistrature. Outre ce choc des organes judiciaires, la crise politique prenait corps par l’opposition catégorique d’une frange des députés provinciaux en particulier et de la population sankuroise à la candidature unique de Lambert Mende qui, à son tour, rejette toute idée du retrait de sa candidature pour quelque raison que ce soit.

Depuis donc cet enlisement, plus aucune initiative n’a été prise, du moins officiellement, pour tenter de régler ces problème set ainsi libérer l’élection du Gouverneur de cette province qui vit dans une extrême pauvreté malgré ses potentialités agricoles et miniers avec le diamant, notamment. Mais comment donc démêler cette crise sans plonger dans les racines des antagonismes qui, en réalité, sont le nœud du problème ?

 

Une crise aux racines profondes

Ce n’est, en effet, pas la première fois que le Sankuru soit traversé par une crise du genre qui tourne autour du pouvoir et, partant, du contrôle de la province. Pour ne pas remonter plus loin, on se rappelle des antagonismes entre leaders de la province déjà l’époque de la Conférence nationale souveraine lorsque certains de ces leaders tenaient d’éliminer leurs adversaires à travers les sensibles commissions des assassinats et des pillages des richesses de l’Etat. Une crise similaire verra de nouveau le jour au sortir du dialogue intercongolais de Sun City, tandis qu’on en vivra une autre lors du découpage territorial quand il s’était agi de trouver le chef-lieu de la nouvelle province du Sankuru.

Pour le cas spécifique des élections, l’on sait que cette province a toujours connu des affrontements, que ce soit en 2006, 2011 et maintenant pour les élections de 2018-2019. Ces différentes crises se sont toujours soldées par des pertes en vies humaines et des destructions des biens, des champs et de cheptels animaux. Et même si le calme revenait toujours, cela ne se résolvait pas les problèmes de fond. En sorte qu’aujourd’hui l’on fait face à des antagonismes haineux qui vont au-delà de la concurrence des leaders politiques autour du pouvoir. Ce sont, en effet, des communautés entières, rangées derrière leurs leaders respectifs, qui se toisent dans une ambiance de haine et d’intolérance telle que le Sankuru est devenu aujourd’hui une poudrière dont l’explosion provoquerait des dégâts que personne ne peut imaginer.

Ces antagonismes mettent aux prises trois des cinq territoires que compte le Sankuru, et des sources dignes de foi renseignent que cette situation est bien connue des autorités nationales. Le dernier cas pour le prouver remonte à la toute dernière mission effectuée au Sankuru par Henri Mova Sakanyi, alors Vice-premier Ministre en charge de l’intérieur et sécurité. A cette occasion, rapportent nos sources, des interlocuteurs de Mova lui avait exposé le fond de la situation et de la querelle de leadership pour lui faire voir à quel point les antagonismes électoraux ne sont que manifestation qui cache la forêt de haine inter-communautaire.

 

Neutraliser les leaders antagonistes

Face à cette situation, des observateurs estiment qu’il faut trouver une formule pour sauver la province de l’emprise de cette crise. La solution préconisée serait de neutraliser les acteurs politiques antagonistes et leurs soutiens en les convainquant d’éviter de se présenter à la compétition électorale pour le gouvernorat. Un tel deal devrait concerne aussi les trois territoires antagonistes et dont le degré de haine et d’intolérance rend hypothétique toute possibilité d’acceptation du vainqueur par les autres territoires, ce qui bloquerait l’exercice correct de l’autorité de l’Etat. Cette idée est tirée du deal passé en Ituri entre les communautés hema et lendu dont les leaders avaient accepté de ne pas se présenter à l’élection du Gouverneur, laissant ainsi la compétition aux ressortissants des autres communautés non concernées par les antagonismes interethniques.

De cette manière, estime-t-on, le Chef de l’Etat et le prochain gouvernement auront le temps et les moyens d’aborder la question plus en profondeur pour des solutions appropriées et efficaces.

JEK

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