MAGISTRATURE : LUMIÈRES SUR LES ORDONNANCES DE KABILA

Une polémique s’entretient autour des récentes ordonnances signées par le Chef de l’Etat et portant organisation de la magistrature. En fait de polémique, il s’agit plutôt d’une confusion, pour cause d’ignorance ou par mauvaise foi délibérée, sur certains détails basés sur une vision plutôt erronée, faisant croire que le Chef de l’Etat, Magistrat suprême, aurait « révoqué » des magistrats à la suite d’une enquête menée par le Ministère de la justice et garde des sceaux avec le concours du Conseil supérieur de la magistrature.

Dans le lot, on inclue le cas d’un magistrat décédé depuis les années 1980 et qui se trouve « révoqué » en 2018, le tout dans une démarche de raillerie sur la personne du Chef de l’Etat qui aurait ainsi commis une bavure sans estimer nécessaire de sanctionner les collaborateurs qui la lui auraient fait commettre.

Après observation des ordonnances présidentielles portant organisation de la magistrature, il se dégage plusieurs constats pour dissiper cette politique. Avant tout, l’on relève que ce sont 12 ordonnances que le Chef de l’Etat a signées, portant organisation de la magistrature. Ces 12 ordonnances sont ventilées comme suit :

3 ordonnances portant démission d’office des magistrats

1 ordonnance portant démission volontaire

1 ordonnance portant relève anticipée

4 ordonnances portant nomination et

1 ordonnance rapportant partiellement des ordonnances ayant nommés irrégulièrement des magistrats. Ces ordonnances rapportées sont au nombre de 10 et couvrent les années 1989, 1991, 2002, 2009, 2011, 2013 et 2016.

De cette ventilation, l’on ne relève aucune ordonnance ayant révoqué des magistrats. Il reste, cependant, de clarifier les notions sur les démissions d’office, les démissions volontaires ou la relève anticipée.

Selon le droit du travail :

Une démission d’office est prononcée à l’endroit d’un employé pour abandon de poste ou pour une absence non justifiée ou sans motif valable d’au moins 10 jours qui ne comprennent pas une éventuelle période de grève. Cette mesure peut s’appliquer pour les cas d’employés décédés et dont le décès n’a pas été signifié ou signalé formellement suivant les procédures administratives requises.

Une démission volontaire est une rupture unilatérale du contrat de travail à l’initiative du salarié. Elle se traduit en général par lettre recommandée avec avis de réception. C’est donc un acte réputé volontaire dont les services compétents qui emploient le salarié vérifient seulement qu’il a été clair et non équivoque.

Quant à la relève anticipée, elle évoque une décision de l‘employeur qui met fin aux prestations d’un employé sous certains cas et suite à certaines situations. Ainsi, dans le cas d’espèce, la relève anticipée peut intervenir :

  • Par accord commun lorsque les deux parties conviennent ensemble de mettre fin à leur collaboration.
  • Pour faute de l’employé. Celle-ci peut être grave ou lourde et ainsi rendre impossible le maintien du travailleur dans son emploi.
  • Pour cas de force majeure liée, notamment, à un événement imprévisible, insurmontable ou étranger à l’organe employeur qui en est victime.

Les ordonnances sous examen sont muettes quant aux motivations de chacune de ces catégories, d’autant plus que les dossiers des concernés ont été examinés au cas par cas avant d’être regroupés dans cette catégorisation. Mais on croit comprendre que cette catégorisation est en rapport avec les constats faits après enquête, notamment des cas de fraudes. C’est le cas de ce qui avait été relevé à l’Université de Kinshasa où, pendant plusieurs décennies, un préposé aux archives de la faculté des droits s’employait à distribuer des faux diplômes à des personnes qui n’en ont pas droit. Plus encore, il prenait soins de les inscrire dans les registres des étudiants comme étant des réguliers.

Dans tous les cas, il n’y a pas lieu de parler ici formellement de révocation qui, en droit du travail, est un tout autre cas qui évoque est une décision ordonnant l’annulation d’une situation juridique tel que l’emploi. Le licenciement est un type de révocation.

Pour le reste, la suite des ordonnances du Chef de l’Etat est du ressort des concernés qui disposent des voies légales pour introduire des recours en cas de lésion, mais, dans tous les cas, l’on n’est pas, ici, dans une polémique politicienne.

PDM

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