Tripatouillage à la Cour constitutionnelle : Le décryptage

Créée par la loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013, la Cour constitutionnelle est entrée en activité à la mi-mai 2015 après l’élection, le 11 avril 2015, de son tout premier Président, Bénoit Lwamba Bindu. La toute première génération de ses juges avait été nommée le 7 juillet 2014. A partir de cette entrée en service, le premier tirage au sort de trois des neuf membres devait intervenir en avril-mai 2018.

La Cour constitutionnelle au fil du temps

Mais à cette période, deux événements majeurs se produisent. D’abord le décès, en date du 8 avril 2018, d’un des juges, Kalonda Kele Oma Yvon. Ensuite la démission, le 9 avril de la même année, de deux autres juges. Jean Louis Esambo et Banyaku Lwape refusent, par ce geste, d’avoir à se prononcer sur l’interprétation de l’alinéa 2 de l’article 70 de la Constitution. Cet alinéa est en rapport avec le maintien du Président en fonction jusqu’à l’installation du nouveau Président élu.

Trois places sont donc vides alors que le tirage au sort attendu doit faire remplacer trois juges. A la place, le chef de l’Etat va nommer trois nouveaux juges le 15 mai 2018, à savoir : Norbert Nkulu Kilombo désigné par lui-même, Jean Ubulu présenté par la Conseil supérieur de la magistrature et François Bokona coopté par le Parlement.

Les événements intrigants qui ont précédé le tripatouillage

Dès lors, un nouveau décompte commence à partir du 15 mai pour le prochain tirage au sort qui doit intervenir au plus tard le en avril 2021. Mais à la surprise générale, ce tirage au sort n’intervient pas alors que les juges choisissent de se désigner un nouveau Président. Ici encore, trois événements majeurs, et plutôt suspects, se produisent.

D’abord, la rencontre, en date du 6 avril 2021 (remarquez bien la coïncidence des dates), avec les neufs juges de la Cour constitutionnelle. Rien ne filtre de ces entretiens, mais on retient que cinq jours plus tard, soit le 11 avril 2021, Evariste Funga Molima, Président a.i de la haute Cour, écrit au chef de l’Etat pour l’informer de l’élection, sauf avis contraire de ce dernier, du nouveau Président projetée pour le 20 avril 2021.

Ensuite le silence assourdissant du côté du Conseil supérieur de la magistrature qui était censé tenir son assemblée générale à la première semaine du mois d’avril. C’est à cette occasion que l’assemblée, qui est l’organe de décision, était censé désigner déjà son juge en remplacement de celui en fonction qui devait être tiré au sort au cours du même mois. Personne n’a eu vent des raisons de cette assemblée générale zappée.

Enfin, silence assourdissant également du côté du Parlement qui devait aussi se réunir en congrès pour se désigner un nouveau juge.

On observe là une succession de passivité plutôt active qui, de l’avis des analystes, en dit long sur ce qui est arrivé. C’est-à-dire l’élection du nouveau Président qui permet aux juges fin mandat de rempiler sans tirage au sort jusqu’en…2024.

Les juges désormais immortels ?

En résumé, on retiendra qu’à ce jour, six ans après son entrée en service, la Cour constitutionnelle fonctionne avec des juges qui dribblent systématiquement leur propre loi organique pour se pérenniser au mieux des intérêts d’en haut lieu… Il s’agit, entre autres, d’Evariste Funga, candidat malheureux à sa confirmation après son intérim. Ensuite Polycarpe Mongulu Tapa’ngane qui remplaça Vunduawe Te Pemako nommé Président de la Cour de cassation en juin 2018. Troisièmement, Corneille Wasenda Nsongo suivi de Jean-Pierre Mavungu Ngumbi

Vient alors le trio à problème. D’abord Dieudonné Kabula Dibwa qui a remplacé Benoit Lwamba, Président de la haute Cour qui est parti l’année dernière dans la même période et dans les conditions que l’on connaît. Ensuite Alphonsine Kalume Asengo qui a remplacé Noël Kilomba Mala dans les conditions que l’on connaît également. Et enfin Kamulete Badibanga Dieudonné remplaçant le juge Ubulu dans les mêmes conditions que Kilomba.

Pour rappel, ces trois derniers juges avaient été nommés dans la foulée des ordonnances non contresignées par le Premier ministre d’alors, Sylvestre Ilunga. Ce fut le clash décisif qui emporta la coalition FCC-CACH.

Jonas Eugène Kota

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