C’est comme si la RDC s’engage dans la voie de la dictature de la volonté et des visées ou attentes politiques des cadres et membres de l’UDPS. Si les perspectives de dérive dictatoriale avaient déjà été mises en évidence par la déclaration de Félix Tshisekedi en visite officielle à Windhoek, la capitale namibienne, d’après laquelle lui en tant que Président de la République, ne peut accepter de régner seulement sans gouverner et toutes les chicanéries et balivernes sur l’interprétation de l’article 78 de la Constitution en rapport avec la problématique de la désignation du Premier-ministre qui doit provenir du Front commun pour le Congo (FCC) qui a la majorité des sièges dans la Chambre basse du Parlement congolais, c’est avec les conclusions de la réunion institutionnelle du lundi 18 mars 2019 que ces dérives se sont clairement esquissées.
Etant donné que du fait de la corruptibilité des députés de l’UDPS qui n’ont voté aucun sénateur pour leur parti, un fiasco électoral aux sénatoriales qui a entraîné l’escalade de la colère et de la violence des combatants de l’UDPS, la réunion interinstitutionnelle tenue pour ce faire a accouché de trois mesures, à savoir : la suspension de l’installation de sénateurs, la suspension de l’élection de gouverneurs et l’ouverture d’enquêtes par le procureur près la Cour de cassation pour débusquer tous les sénateurs trempés dans la corruption et les députés provinciaux.
Au chapitre de réactions, notons le tweet de Bola Fréderic pour qui il y a dérive vers la dictature de Fatshi. A son analyse, la réunion interinstitutionnelle n’est pas une institution reconnue par la Constitution, ses mesures n’ont aucune valeur juridique et constituent une tentative de renversément du régime constitutionnel. Ce qui soulève la problématique de la conformité aux dispositions constitutionnelles des propos et démarches du Président Félix Tshisekedi dans son envolée du changement. Certes, la corruption est un fléau qui met à mal la bonne gérance de la RDC, mais ce n’est pas parce qu’on veut l’éradiquer qu’il faille se départir de la Constitution. De surcroît, ce n’est pas parce que l’UDPS n’a eu aucun sénateur qu’on doit suspendre l’installation du nouveau sénat, voire la tenue des élections de gouverneurs et vice-gouverneurs. L’UDPS aurait du ne se déployer que contre ses députés provinciaux qui le plus curieusement du monde n’ont fait gagner aucun siège au sénat à l’UDPS. On comprend que le chef de l’Etat se donne des compétences paraconstitutionnelles pour arriver au changement ou à asseoir sa volonté du changement. Mais il sied toujours de « frapper » selon la Constitution et distinguer entre les intérêts de l’UDPS et ceux de la nation congolaise toute entière. Les contestations d’un parti perdant à un type donné d’élection doivent-elles, désormais, conduire à la suspension des résultats dudit type d’élection ? Autrement, l’on se demanderait pourquoi l’on ne réserve pas le même traitement aux réclamations de Martin Fayulu qui clame partout avoir gagné les élections, exigeant le recomptage des suffrages valablement exprimés bureau de vote par bureau de vote. L’UDPS n’approuverait-elle que les situations qui lui sont favorables et bloquerait-elle la vie de toute la nation si elle n’a pas gain de cause?
Dans un communiqué en réaction aux trois mesures prises au terme de la réunion interinstitutionnelle signé par le Coordonnateur du FCC, Néhémie Mwilanya, la plateforme sous la houllette de Joseph Kabila fait remarquer que la réunion interinstitutionnelle est un cadre de concertation qui ne dispose d’aucun pouvoir de décision et l’interinstitutionnelle ne serait fondée qu’à formuler des recommandations aux institutions constitutionnellement habilitées à prendre des décisions dans des matières ayant fait l’objet de ses délibérations. Abordant la mesure relative au report sine die des élections de gouverneurs et vice-gouverneurs, le communiqué du FCC rappelle que la Constitution confère à la seule Commission électorale nationale indépendante (CENI), la compétence d’organiser les élections, rappelant qu’il revient à la seule CENI qui est une structure indépendante de fixer le calendrier électoral et, le cas échéant, de le modifier. Le FCC poursuit en fustigeant la tentative de freiner le processus tant attendu du renouvellement du sénat, une institution dont les animateurs ont accompli plus de deux législatures sans être renouvellés. Se prononçant contre la corruption et se préoccupant de la menance qui pèse sur la poursuite du cycle électoral, le FCC se désolidarise avec toutes les mesures arrêtées par l’interinstitutionnelle qui vont à l’encontre, conclut le communiqué, des lois de la République… Une prise de position du FCC qui est une invective à se conformer à la Constitution par rapport aux conclusions de l’interinstitutionnelle, attirant l’attention sur les compétences constitutionnelles de chaque institution du pays sur telle ou telle autre matière.
Un précédent politique dont les leçons à tirer conscientisent sur la nécessité de toujours s’efforcer de conformer ses décisions ou mesures à la Constitution, veillant à rester dans les limites des pouvoirs conférés par la Constitution ainsi qu’à faire la différence entre les problèmes internes d’un parti et ceux concernant tout le pays. Un précédent politique qui appelle à la bonne foi, à la responsabilité, à la délicatesse et à l’élégance politiques de la classe politique et dirigeante de la RDC. Un précédent politique qui interpelle sur la maîtrise et l’éducation des forces vives par les cadres politiques de la RDC. Un précédent qui prévient sur la maîtrise des compétences des uns et des autres pour éviter toute friction dans l’avenir et surtout éviter de se laisser éconduire par ceux qui abordent par la raison des matières éminnement techniques ou juridiques.
Samy BOSONGO