LAMUKA, ÉCHEC DE LEADERSHIP ET DÉCHÉANCE ÉTHIQUE

Sous les regards médusés et la conscience désabusée des Congolais, les leaders de la coalition politique « Lamuka » s’entredéchirent comme des chiffonniers. Au lendemain de la marche non actée du dimanche dernier, des factions de cette plate-forme, née à Genève avant les élections et re-profilée à Bruxelles après les élections, s’affrontent à coups de déclarations et contredéclarations autour d’une activité qu’ils avaient pourtant convoquée de commun accord à travers une lettre à l’autorité urbaine rédigée par le MLC.

D’abord ce rejet de la déclaration du même 30 juin reprenant les noms des différents leaders, mais sans leurs signatures. « Ensemble pour le changement », regroupement politique pro-Katumbi dit ne pas s’y reconnaître et en dénonce l’initiative, provoquant ainsi l’ire de l’aile pro-Fayulu de Lamuka qui fustige l’absence prolongée de Katumbi qui séjourne en Egypte où il suit la coupe d’Afrique des nations pendant que le pays brûle.

Ensuite cette offensive d’Olivier Kamitatu et Francis Kalombo, ci-devant Directeur de cabinet et porte-parole de Katumbi, qui ne ratent pas Martin Fayulu en réaction à un document attribué à celui-ci dans lequel il aurait proposé à Félix Tshisekedi un deal pour la gestion d’un programme de réformes multisectorielles dont lui, Fayulu, prendrait les commandes tandis qu’il laisserait la magistrature suprême à Tshisekedi. Le document de cette proposition, assure-t-on, circule depuis deux mois dans les milieux diplomatiques.

Quoiqu’il en soit, les deux lieutenants de l’ancien Gouverneur de l’Ex-Katanga truffent leurs propos d’une charge de violence verbale inouïe à l’endroit de Fayulu pour cette initiative qu’ils jugent solitaire et égoïste.

Jusqu’à ce mardi matin, personne du camp de Fayulu comme de celui de Katumbi ne confirme ni ne dément ces propos et documents qui écument les réseaux sociaux, au moment où le MLC et ses cadres se murent dans un silence assourdissant, et pendant que Mbusa Nyamuisi Antipas avait, depuis la semaine dernière, déclaré avoir mis fin à son séjour dans l’opposition.

 

Epilogue prévisible d’une alliance hypocrite

Cette triste fin de Lamuka n’a rien d’une tragédie aux yeux de certains observateurs qui ne lui prêtaient, d’ailleurs, aucune vie au-delà du cadre manipulateur de l’Occident. Pour ces observateurs, en effet, cet attelage de quelques leaders congolais n’était rien de plus qu’un cheval de Troie monté par des lobbies politico-affairistes occidentaux dans l’espoir de conquérir le pouvoir à des fins bien déterminées tout au long de la campagne pro-Fayulu : prendre le pouvoir, requalifier le code minier, renvoyer le parlement et organiser de nouvelles élections dans les deux ans.

A présent que ces lobbies et leurs parrains dans les institutions étatiques occidentales semblent trouver une voie de positionnement dans les arcanes du nouveau pouvoir, « Lamuka » n’est plus qu’une coquille vide et même ceux qui espéraient en tirer une source de leadership se réorganisent autrement. Le cas de « Ensemble pour le changement » de Katumbi qui peut repartir calmement dans un cadre où il n’aura pas à se faire quereller son leadership. Le cas également du MLC avec sa trentaine de députés et sénateurs qui peuvent apporter leur soutien au leadership de leur chairman – JP Bemba – désormais homme libre. Le cas encore de Mbusa et son RCD-K/ML qui retrouve ses montagnes de Beni-Butembo-Lubero, fort d’une connexion (déjà) établie avec le nouveau pouvoir. Le cas, enfin, de l’alliance radicaliste pro-Bandundu (ce n’est pas un euphémisme) de Fayulu et Muzito, mais sans Matungulu qui semble avoir jeté l’éponge de la lutte politique. Cette alliance a choisi de se spécialiser dans le tape-à-l’œil médiatique et le bourdonnement auditif avec des déclarations aussi extrémistes que maximalistes, basées essentiellement sur la surenchère et le mensonge, pour compenser son déficit d’assise institutionnelle. Ils ne disposent, en effet, presque d’aucun député ni sénateur.

 

Echec de leadership et déchéance éthique

Chacun s’en va ainsi dans son coin, laissant au milieu tous ces militants qui se sentent désabusés après avoir été ainsi lâchés par ce leadership éphémère qui signe là son échec de la manière la plus déconcertante qui soit. Très bientôt, ce leadership éclaté va se ruer, sans vergogne, sur le poste de porte-parole de l’opposition. Sans vergogne puisque chacun trahira, dans cette conquête ultime, les vrais préoccupations qui l’ont toujours animés, à savoir l’assouvissement d’une ambition personnelle.

Des Congolais auront alors été entraînés dans la rue, et certains y auront laissé la vie juste pour accompagner une poignée d’acteurs politiques qui n’étaient unis par aucun idéal, sinon cette alliance des dupes.

A cet échec de leadership s’ajoute ainsi la déchéance de l’éthique pour ces « leaders » sans vergogne qui ont, de manière éhontée, instrumentalisé les réelles aspirations populaires pour leurs fins personnelles. Bref, un capitalisme dans la pire de ses cruautés, qui s’est abreuvé aux artères sanguines des Congolais aujourd’hui largués en attendant les prochaines joutes électorales.

Jonas Eugène Kota

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