Les dernières déclarations d’Augustin Kabuya lors d’une matinée politique de son parti politique continuent de soulever indignations et protestations. La gravité de ses propos ont fait réagir aussi bien en interne qu’à l’international. Le Bureau conjoint des Nations-Unies aux droits de l’homme (BCNUDH) n’a, en effet, pas hésité à les qualifier d’«incendiaires » avant d’estimer qu’ils « sont de nature à inciter à la violence ».
Tout en mettant en garde contre de tels propos, le BCNUDH invite les autorités congolaises à prendre des mesures pour prévenir et sanctionner leurs auteurs. Il estime que « les menaces contre les personnes et leurs biens sont contraires à la loi et aux exigences d’une société démocratique ».
De son côté, le Ministre congolais des droits humains, André Lite, a, au cours d’une conférence de presse mercredi, également condamné ces propos qu’il a trouvés contraires à l’«Union sacrée » prônée par le chef de l’Etat. « Ce sont des propos à réprimer, sinon à condamner », s’est-il indigné avant d’ajouter : « Quelle que soit la situation, aucun Congolais ne peut être contraint à l’exil. L’union sacrée à laquelle le Président de la République nous convie tous est aux antipodes des propos tenus par ce haut responsable de l’UDPS ».
Au cours d’une matinée politique, le Secrétaire général de l’UDPS a notamment accusé le Ministre des finances (FCC) de geler les salaires des militaires, des policiers et des fonctionnaires pour les soulever contre le chef de l’Etat. Il a promis d’envoyer les membres du FCC en exil et de leur faire subir le sort des mobutistes en 1992. Cette année-là, en effet, des pillages s’étaient produits pour une seconde fois à Kinshasa, et les résidences des dignitaires de l’époque furent particulièrement ciblées par les pillards.
José Sele porte plainte contre Augustin Kabuya
Jeudi 11 novembre, le Ministre des finances a saisi le Procureur Général près la Cour d’appel de Kinshasa/Gombe d’une plainte à charge de Kabuya pour diffamation et incitation à attenter à la vie d’autrui. José Sele estime que « le fait que M. Augustin Kabuya se soit permis, dans ses propos incendiaires, de faire allussion personnellement à moi et à trois reprises dans son discours des menaces et d’appel à la violence à mon endroit particulièrement, me fonde à vous saisir et dénoncer ce comportement infractionnel (…), écrit l’argentier national. Il rappelle que ces faits infractionnels sont prévus et punis par le Code pénal congolais en ses articles 74, 159 et 160, livre II.
Augustin Kabuya feat Charles Blé Goudé !
Face à l’extrémisme dont il a fait montre dans ces propos qui, du reste, ne sont pas les premiers du genre de sa part et de la part d’autres cadres de son parti, les observateurs n’hésitent pas à comparer Augustin Kabuya au tristement célèbre Charles Blé Goudé de la Côte d’Ivoire. Les actions de ce dernier lors de la crise politico-militaire de 2004 dans son pays avaient soulevé le même genre de tollé jusqu’à le conduire à des sanctions onusiennes pour avoir incité à la haine et participé à des actes d’extrême violence.
Malgré cela, Charles Blé Goudé va récidiver lors de la crise de 2010-2011 après l’échec de son candidat Laurent Gbagbo à la présidentielle. La Cour pénale internationale (CPI) émet alors un mandat d’arrêt international à son encontre pour crimes contre l’humanité. Arrêté en 2013 au Ghana, il va être transféré à la Haye après une détention en Côte d’Ivoire.
Même s’il est acquitté en 2019 à la CPI, il écope d’une condamnation, par la justice ivoirienne, à 20 ans de prison.
En RDC, les observateurs invitent vivement la justice à se pencher sérieusement sur le cas Kabuya pour prévenir les débordements de nature à plonger le pays dans le même chaos que celui connu par la Côte d’Ivoire suite aux propos analogues de Charles Blé Goudé. Dans le même temps, le chef de l’Etat est instamment invité à prendre l’initiative de la sanction contre ce genre de comportement, surtout de la part de ceux qui disent lui être proches mais qui sont les principaux fossoyeurs de son image de garant de la Nation.
Et cela constituera un signal fort pour décourager tous les autres apprentis pyromanes, toutes tendances confondues. En attendant, la plainte de José Sele contre Kabuya a provoqué un vaste élan de soulagement de la population a désormais le regard tourné vers la justice pour savoir comment elle se comportera.
JEK