Un calme précaire règne à Lubumbashi après le week-end mouvementé suite à l’attaque d’un camp militaire et un dépôt de munition par des assaillants présentés comme étant des miliciens Bakata-Katanga. Calme précaire puisqu’il subsiste encore des foyers de tensions sous les cendres et qui pourraient rallumer le feu. Surtout sur le front politique où le Haut-Katanga s’apprête à vibrer au rythme de l’élection du nouveau bureau de l’Assemblée provinciale et, plus tard, une éventuelle déchéance du Gouverneur Jacques Kyabula, à défaut de sa démission, en droite ligne de la stratégie de conquête du pouvoir par l’Union sacrée de la Nation.
Même si on n’en est pas encore là s’agissant de la conquête de l’exécutif, les esprits s’y trouvent déjà et les états-majors s’attèlent à peaufiner des stratégies. Pour l’heure, selon des sources de congovirtuel.org à Lubumbashi, une effervescence particulière s’observe du côté de Jean Claude Muyambo Kyassa qui ne ferait plus mystère de son ambition de devenir Gouverneur de province.
Candidat malheureux lors de l’élection du Gouverneur en avril 2019, élection remportée par Jacques Kyabula, Muyambo n’a jamais digéré cette défaite et était même allé en justice pour attaquer les résultats. Aujourd’hui, selon les signaux qu’il émet à Lubumbashi et ailleurs à travers la province cuprifère, l’ancien bâtonnier s’emploie déjà à saper les moyens éventuels de Jacques Kyabula dans l’éventualité d’une nouvelle confrontation. Alors que tous les deux évoluent aujourd’hui au sein de l’USN, leur rivalité n’a d’égal que l’ambition et la détermination du premier de prendre le contrôle de la province cuprifère.
Les chances de l’un et de l’autre
A l’avantage de Muyambo, on avance l’appui indéfectible qu’il attend de son frère Moïse Katumbi qui a la haute main sur l’Assemblée provinciale grâce à ses députés du G7 et de l’AMK. Après la profonde crise qui les avait opposés dans les années 2011-2012, Jean-Claude Muyambo et Katumbi Tshapwe ont, depuis, fumé le calumet de la paix pour filer une douce fraternité, notamment au sein de l’association socioculturelle Sympia des bemba dont ils sont membres.
En face, indiquent nos sources, Jacques Kyabula n’a encore manifesté aucune intention particulière – du moins officiellement – au sujet de ce qui est attendu en terme de reconfiguration de l’environnement politique de la province à l’aune du vent de l’Union Sacrée. Depuis qu’il a adhéré à la mouvance tshisekediste cependant, le Gouverneur en fonction n’a tarit pas d’initiatives pour entretenir son image et renforcer son ancrage au sein de la population. A ses actions à impact visible comme Gouverneur, il joint, ces derniers, une grande offensive philanthropique avec force médiatisation à travers la province. Une croisade qu’il met à profit pour répandre l’évangile de l’Union sacrée afin d’y ramener « ses » brebis qu’il entretenait – avec une certaine maestria – au FCC/PPRD.
La dernière situation sécuritaire du week-end dernier aura également été une belle opportunité pour Kyabula de confirmer son ancrage dans la tshisekedie grâce à la rapidité avec laquelle le dispositif sécuritaire locale a su contrôler la situation. Autant d’initiatives donc qui lui rapportent une certaine sympathie dans la masse, mais cela lui suffit-il pour réussir à se maintenir et éviter ainsi la bourrasque « unioniste » ?
Dans tous les cas, Muyambo ou Kyabula, tout dépend des calculs qui se feront à partir de Kinshasa, bien entendu en concertation avec les forces politiques en présence sur terrain. Et ici, Jacques Kyabula, qui doit déjà conforter son acceptation dans sa nouvelle famille politique, pourrait partir pour une confrontation avec Katumbi par Muyambo interposé. Les analystes n’excluent, en effet, pas une éventuelle détermination de Katumbi de reconquérir, quoique par personne interposée, le Haut-Katanga qu’il avait été contraint d’abandonner en 2015.
Jonas Eugène Kota