ETAT D’URGENCE : LA PAROLE DE THAMBWE-MWAMBA CONTRE CELLE DE KABUND

Un dangereux débat politique s’installe au sujet du soubassement légal, ou pas, de l’état d’urgence proclamé depuis le 24 mars 2020 par le chef de l’Etat, état d’urgence dont la durée tire à sa fin et nécessite une éventuelle prolongation qui va impliquer des autorisations du parlement après délibération en conseil des ministres. Le débat part de deux sorties médiatiques du week-end dernier : celles d’Alexis Thambwe-Mwamba et jean-Marc Kabund.

En confrontation dans ces deux interventions, la base légale du départ quant à la décision de proclamation de l’état d’urgence par le chef de l’Etat. Alexis Thambwe-Mwamba soutien la thèse d’une situation de fait au motif que cette décision n’aurait pas reçu les autorisations préalables du Parlement. Il soutien aussi que la rencontre du Président de la République avec les Présidents des deux chambres du Parlement et le Premier ministre n’avait pas  abordé la question de l’instauration d’un état d’urgence. Qu’à cela ne tienne, et sans aller dans un juridisme qui risquerait de déboucher sur une crise institutionnelle dont personne n’a besoin, poursuit-il, la démarche en cours au niveau du Parlement consiste à prendre acte de cette situation de fait et se tourner vers l’avenir en mettant en place les lois d’application et d’accompagnement de l’état d’urgence qui, selon toute vraisemblance, pourrait être prolongé.

De son côté, Jean-Marc Kabund soutient mordicus que l’état d’urgence décrété par le Président de la République est régulier car ayant suivi la logique de l’article 85 de la Constitution. Cet article, selon lui, n’évoque pas une autorisation préalable du Parlement, mais seulement une concertation du chef de l’Etat avec les chefs de corps du Parlement et du Gouvernement, concertation qui avait eu lieu le 22 mars à la cioté de l’Union africaine. Pour Kabund donc, le Congrès projeté est sans objet. Il accuse Thambwe-Mwamba d’avoir cherché à jeter le chef de l’Etat en pâture en l’accusant d’avoir décrété un état de droit de fait et dénonce une démarche (le congrès) trop longue face à une urgence et trop honéreuse puisque de nature à coûter  7 millions de dollars pour une seule plénière.

En synthèse, et toutes considérations sur les autres aspects du dossier devant être examinées par ailleurs, la divergence majeure réside dans l’articulation ou pas de l’article 85 à partir de la réunion institutionnelle du 22 mars. L’état d’urgence y a-t-il été abordé ou pas ?

Face à ces deux déclarations opposées, on peut en venir à chercher de quel côté penche la vérité. Il s’agit de choisir entre la parole d’ATM et celle de Kabund.

D’un côté, Thambwe-Mwamba s’est exprimé dans les médias en sa qualité de chef de corps, puisqu’étant Président du Sénat. Il a fait une sorte de compte-rendu de l’évolution des préparatifs du congrès tout en précisant son ordre du jour. Ils’est également montré conciliant et prévenant quant au risque d’un clash politique institutionnel dans le contexte actuel d’une grave crise touchant à la vie des Congolais et, partant, mettant en danger l’humanité.

De l’autre côté, Jean-Marc Kabund s’est porté dans ce débat en libre penseur (il a dit user de sa liberté de pensée et d’expression). Il a donc choisi de se libérer de ses droits et obligations que lui confèrent ses statuts de parlementaire et membre du bureau de l’Assemblée nationale. Sa démarche est celle d’un politicien agissant dans une posture partisane et va-t-en guerre en faveur du chef de l’Etat qu’il cherche à protéger contre ce qu’il considère comme une démarche floue des deux chambres du parlement dont il a choisi de se désolidariser pour les combattre. L’allusion au danger de contamination et au coût du congrès (qui reste à vérifier quand même) participe manifestement d’une démarche de diabolisation du projet de Congrès pour le faire avorter, non pas au nom du droit, mais pour des besoins purement politiques sans gains particulier pour le Congo.

Par ailleurs, Jean-Marc Kabund assoit sa conviction sur des informations auxquelles il dit avoir accéder d’une manière pour le moins illicite. Il s’est, selon ses propres propos, retrouvé dans une réunion interinstitutionnelle à laquelle il ne devait pas prendre part à l’instar de ses autres collègues comme Samy Badibanga, vice-Président du Sénat.

Deux personnages donc, deux statuts, deux postures et deux démarches. D’une part, un chef de corps se préoccupe des procédures juridiques et institutionnelles. D’autre part, un citoyen lambda – à la limite acteur politique – se porte sur le front partisan dans une démarche politicienne pour des intérêts politiques et individuels.

A l’opinion de choisir en tenant compte de la gravité de la situation et, surtout, en considérant que dans la circonstance actuelle, l’Etat, c’est-à-dire toute ses institutions, est appelé à fonctionner à plein régime et dans le respect des lois. Car, il y va, non pas seulement de la vie des Congolais, mais aussi de leurs droits et libertés consacrés par la Constitution.

JEK

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